Insulter son employeur sur Facebook n'est pas nécessairement une faute
Mme Y... a été licenciée pour faute grave par lettre du 3 mars 2009 notamment pour avoir tenu et échangé des propos injurieux accompagnés de menaces sur Facebook.
Il résultait d'un procès-verbal de constat dressé par huissier de justice, que Mme Y... avait adhéré à un groupe sur Facebook intitulé : « Extermination des directrices chieuses », où elle avait proféré des propos injurieux et offensant à l'égard de son employeur.
L'existence de propos injurieux et calomnieux sur le réseau social suffisait-il à justifier le licenciement de la salariée ?
Il incombe à l'employeur de démontrer le caractère public des propos litigieux.
Selon l'employeur, la seule diffusion, "publique" ou "privée", par le salarié sur le réseau social Facebook de propos injurieux et humiliants à l'encontre de son employeur caractérise une faute grave.
Mais, les propos tenus par Mme Y... sur Facebook n'étaient accessibles qu'à des personnes agréées par le titulaire du compte. Le groupe était donc "fermé" et composé de seulement 14 personnes.
Dans ce cadre, la salariée plaidait que ses propos relevaient d'une conversation de nature privée et ne pouvaient pas constituer un motif de licenciement.
C'est ce qu'a retenu la Cour d'appel et ce qu'a confirmé la Cour de cassation.
Cette solution est à rapprocher d'un arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour de cassation du 10 avril 2013 (11-19.530) pour comprendre l'approche de la Chambre sociale de la Cour :
" les propos litigieux avaient été diffusés sur les comptes ouverts par Mme X... tant sur le site Facebook que sur le site MSN, lesquels n'étaient en l'espèce accessibles qu'aux seules personnes agréées par l'intéressée, en nombre très restreint, la cour d'appel a retenu, par un motif adopté exempt de caractère hypothétique, que celles-ci formaient une communauté d'intérêts ; qu'elle en a exactement déduit que ces propos ne constituaient pas des injures publiques ".
Pour mémoire, quelques éléments sur l'articulation entre la vie privée du salarié et le pouvoir disciplinaire de l'employeur :
Un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut pas, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail : Cass.Soc.18 mai 2007, n°05-40803.
Si en principe, il ne peut être procédé à un licenciement pour un fait tiré de la vie privée du salarié, il en va autrement lorsque le comportement de celui-ci a créé un trouble caractérisé au sein de l’entreprise : Cass.Soc.14 septembre 2010, n°09-65675.
L’employeur peut consulter les fichiers qui n’ont pas été identifiés comme "personnels" par le salarié, mais il ne peut pas les utiliser à son encontre dans une procédure judiciaire s’ils relèvent de sa vie privée. : Cass. Soc. 5 juillet 2011, n°10-17284.